Clearstream : Villepin charge Sarkozy et Michèle Alliot-Marie

Publié le par P.A.

Le général Rondot, qui a enquêté sur l'affaire Clearstream, a réaffirmé avoir eu connaissance de la falsification des listings dès juillet 2004 et en avoir averti immédiatement l'ancien Premier ministre. Ce que nie Dominique de Villepin. Ce point est central pour l'accusation qui affirme qu'alerté de la calomnie, il aurait pu y mettre fin.

Dominique de Villepin cherche l'effet boomerang. « Je veux bien rendre des comptes et je suis ravi de le faire mais le fonctionnement de l'Etat n'est pas aléatoire. Chaque ministère doit rendre des comptes ». Au mois de juillet 2004, l'affaire Clearstream est sorti dans la presse. Un « corbeau » _aujourd'hui l'on sait que c'est Jean-Louis Gergorin_ alimente le juge Renaud Van Ruymbeke de faux listings Clearstream laissant apparaître des noms d'hommes politiques dont celui de Nicolas Sarkozy. « La question qui se pose est : qu'ont fait pendant cette période, le ministère de la Défense (dirigé à l'époque par Michèle Alliot-Marie, NDLR) qui a sous ses ordres la DGSE, le ministère de l'Economie et des Finances (dirigé lui par Nicolas Sarkozy) alors qu'une chambre de compensation est mise en cause ?», s'insurge l'ancien Premier ministre, relaxé en première instance mais renvoyé sur appel du parquet pour « complicité de dénonciation calomnieuse ». Le parquet le soupçonne d'avoir laissé l'affaire s'étendre alors que, ministre de l'Intérieur en 2004, il savait que les listings étaient faux.

« Dès le début on m'a montré du doigt... »

« A cette époque, il y a début d'instrumentalisation », continue Dominique de Villepin devant la cour. Et l'ancien Premier ministre enfourche son cheval de bataille : « Nous savons que Nicolas Sarkozy et son entourage désignent dès l'origine des coupables, (...) dès le début on m'a montré du doigt et la trace du doigt a été assez forte pour que l'on se retrouve ici six ans après », clame Dominique de Villepin.

La cour vient d'aborder la réunion du 19 juillet 2004 au ministère de l'Intérieur entre Dominique de Villepin et le général Rondot. A cette époque, l'officier rentre de Suisse où les autorités viennent d'opérer des vérifications qui l'ont convaincu que les listings ont été falsifiés. «J'informe Dominique de Villepin de la certitude, j'insiste sur ce mot, que nous avons Philippe Marland (le directeur de cabinet de la ministre de la Défense, Michèle Alliot-Marie, NDLR) et moi-même de la fausseté des listings», assène le général Rondot. Au cours de cette rencontre d'après la note du militaire, l'ancien Premier ministre de Jacques Chirac aurait dit « si nous apparaissons le PR (président de la République, NDLR) et moi nous sautons ».

Une pointe de mépris

Toujours aussi droit, le général Rondot aborde cette note avec des pincettes. Il ne veut pas être mêlé à cette affaire qui devient, à l'époque « politique », et l'on sent chez le vieux général une pointe de mépris. Mais il tient tête à Dominique de Villepin qui nie a voir eu connaissance à cette époque de la fausseté des listings. Ce point est central pour l'accusation qui affirme que le prévenu, alerté de la calomnie, aurait pu y mettre fin.

«Est-ce que j'aurais saisi le général Rondot si j'étais au courant de la fausseté des listings? ! (...) Je ne sais toujours pas aujourd'hui ce qu'on me reproche. Comme ministre, j'ai obéi à des principes et je n'y ai jamais dérogé !». Il se rassoit. Solennel. La salle fait silence.

Imperturbable, le général Rondot reprend sa place derrière le pupitre. «Bon, je poursuis...». Le 19 juillet « je n'ai pas de doute sur la fausseté des listings mais mes doutes et interrogations demeurent sur l'origine du montage. Je me réfère au risque que le président de la République soit atteint », explique le général.

« Nous étions inquiet d'une instrumentalisation qui se confirme aujourd'hui » Dominique de Villepin qui a trouvé sa ligne de défense attaque aussitôt : « Je suis d'accord avec le sens général de la note de Philippe Rondot, mes inquiétudes sont politiques et médiatiques », explique l'ex-Premier ministre « à l'époque, Nicolas Sarkozy et son entourage désigne d'emblée la responsabilité de Jacques Chirac et la mienne. Nous étions inquiet d'une instrumentalisation qui se confirme aujourd'hui », répète-t-il.

Les avocats des prévenus s'agitent, lèvent leurs manches, s'envoient des dates, des notes, la présidente peine à rétablir un peu d'ordre... Le public dans la grande chambre de la cour d'appel de Paris, lui, est comme le général Rondot en 2004, il continue à avoir des doutes tant le scénario et le mobile de l'intrigue Clearstream restent flous, autant que ces cibles réelles. Les listes comportaient en effet d'autres noms célèbres à gauche, dont celui du socialiste Dominique Strauss-Kahn, ainsi que les noms des rivaux industriels de Jean-Louis Gergorin.

Source: Les Echos, Valérie de Senneville

Publié dans Clearstream

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