Dominique de Villepin: premier opposant de France

Publié le par P.A.

Mis en examen dans l'affaire Clearstream, Dominique de Villepin revendique sa liberté de parole pour critiquer tous azimuts le président.

Comme tous les jours, il est en jean. Depuis qu'il a quitté Matignon, Dominique de Villepin a opté pour la version décontractée, denim délavé et veste en velours grosses côtes. Ce premier jeudi d'octobre, l'ancien chef du gouvernement est attendu à Nantes pour une séance de dédicaces de son dernier livre, Le Soleil noir de la puissance, 1796-1807 (Perrin).

11 h 57. Dominique de Villepin arrive de son bureau, mis à sa disposition par le Quai d'Orsay près de l'Etoile, à Paris. Il explique qu'il rédige ses manuscrits à la main, qu'il ne s'est jamais servi d'un ordinateur - d'ailleurs, précise-t-il, il ne sait même pas comment ça s'ouvre. Embraye derechef: «Et on veut me mêler à une affaire de listings informatiques, alors que j'ai chargé le général Rondot et la DST d'évaluer le dossier? Ces critiques sont absurdes!» Ce sera aux juges d'en décider: le 11 octobre, Dominique de Villepin est convoqué pour une nouvelle audition dans le dossier Clearstream.

Il assure qu'il ne règle aucun compte personnel avec Nicolas Sarkozy. Il affirme qu'il exerce juste sa liberté de parole. La dernière fois qu'il a vu le président - «Le 18 juin... une date qui ne s'oublie pas!» - Dominique de Villepin raconte que Sarkozy, à la fin de l'entretien, a appelé son secrétariat: «Notez! Je veux le voir tous les mois.» Belle mise en scène pour une rupture, songe à cet instant le sortant. Il dénonce encore le phénomène de «courtitude» en vigueur à l'Elysée. «Qui dit à Sarkozy qu'il se trompe? Personne.» Pourtant, à écouter Dominique de Villepin, le président se trompe chaque fois qu'il s'exprime. Et de citer sa prise de parole devant les parlementaires UMP: «Il explique qu'il a dit qu'il ferait et donc qu'il fera. C'est bien, mais cela ne suffit pas. S'abstraire des circonstances serait ridicule et dangereux. Ce serait de l'amour-propre mal placé. La clef, en politique, c'est de s'adapter.»

Devant la presse locale, il s'en prend à l'ouverture, qui exaspère les élus de la majorité. Villepin, jadis si prompt à les couvrir de noms d'oiseaux, abonde aujourd'hui dans leur sens: «Quel intérêt, si les gens nous rejoignent sans rien apporter? Chez nous, il en existe d'aussi compétents, d'aussi enthousiastes et de plus légitimes. Ne les oublions pas!» Même les sondages en frémissent, qui ont fait de Villepin le «meilleur opposant» au président - critiquer le pouvoir rapporte parfois plus que l'exercer.

 

La centaine de livres prévus par le libraire pour la séance est vendue en deux heures. Les acheteurs se succèdent. «Je vous ai soutenu pour le CPE», rappelle l'un; «Je me suis sentie fière d'être française en vous écoutant à l'ONU», confie l'autre. «C'est pour ma mère, précise un troisième. Avant, elle était gauchiste... - Moi aussi! l'interrompt l'auteur - Maintenant, elle est amoureuse de vous!» La politique mène à tout.

Source: L'Express

Publié dans 2007

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